Publié le 31 mars 2023 - Par Nicolas - Catégorie: Les radars en général
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Radars privatisés, un ancien conducteur dénonce les conditions de travail

Depuis 2018, l'État a décidé d'externaliser la gestion des voitures radars, c'est-à-dire d'en confier la conduite à des chauffeurs employés par des sociétés privées. Aujourd'hui, ce sont chaque jour plus de 200 véhicules qui sillonnent les routes de 55 départements pour traquer les excès de vitesse.

Alors qu'il pensait s'être engagé pour concourir à l'amélioration de la sécurité routière, Sébastien (nom d'emprunt), un ancien conducteur, a vite été rattrapé par la réalité. Ses confidences recueillies par les journalistes du journal L'Alsace sont édifiantes tant sur les conditions de travail que sur la course au chiffre.

Des véhicules en mauvais état

Selon les chiffres annoncés par la Sécurité routière, une voiture radar privatisée parcourt en moyenne 250 kilomètres par jour soit plus de 90 000 kilomètres par an.

Dès lors, de nombreux véhicules utilisés à ce jour affichent plus de 250 000 kilomètres au compteur comme le confirme les derniers véhicules vendus aux enchères par le Domaine comme cette Peugeot 308 arborant 341 546 km.

Ces véhicules à fort kilométrage multiplient les ennuis mécaniques. Sébastien a ainsi été contraint « de prendre le volant de voitures avec des pneus lisses, des voyants d'airbag allumés, des avertisseurs de niveau d'huile insuffisant, des plaques d'immatriculation non conformes car abîmées, etc ».

Une voiture radar circulant avec le feu arrière gauche cassé

voiture radar avec un feu cassé

Là encore, ses dires sont confirmés par les véhicules présentés aux enchères comme cette autre Peugeot 308 pour laquelle il faut prévoir le remplacement de la jauge à carburant, du kit d'embrayage avec émetteur et du volant moteur (sous réserve de démontage) et qui connait en plus un problème d'embrayage avec une pédale bloquée.

Pour les réparations, les conducteurs sont chargés d'amener eux-mêmes les voitures au garage mais il faut au préalable avoir reçu l'autorisation du manager.

Une voiture radar circulant avec une plaque illisible

voiture radar avec plaque illisible

Mais ce n'est pas tout, puisqu'il lui est même arrivé de conduire un véhicule en l'absence de carte grise et de certificat d'assurance.

Des conditions de travail difficiles

Les conditions de travail des conducteurs de voitures radars privatisées sont également très difficiles puisqu'ils alternent trois tranches horaires: de 5 h 30 à 15 h 30, de 15 h à 22 h et de 20 h 30 à 3 h 30 du matin.

D'après Sébastien, « les onze heures de coupure entre deux prises de poste ont toujours été respectées » mais la succession d'horaires de nuit avec des horaires en journée ne permet pas de se reposer efficacement surtout en parcourant 300 à 500 kilomètres par jour . Il lui est ainsi arrivé d'éviter des accidents mais de « taper des bordures » après avoir enchaîné deux nuits en weekend puis avoir repris le lundi après-midi.

Une pause de 15 minutes est obligatoire toutes les deux heures. Pendant ce laps de temps, le chauffeur à « l'obligation de surveiller le véhicule ».

Stress au volant

Conduire une voiture radar est un métier à risques puisque les conducteurs sont régulièrement pris pour cible par les autres automobilistes. D'ailleurs, Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur a déjà confirmé que des actes malveillants sont régulièrement constatés. Ceux prenant la forme d'actes dangereux donnant lieu à des dépôts de plainte ou de main courante.

Sébastien a lui déjà été insulté au volant, un de ses collègue, pris en chasse, a dû se réfugier dans une gendarmerie, etc.

Sans compter toutes les personnes qui prennent des photos des véhicules et de leur conducteur pour les publier sur les réseaux sociaux.

Chauffeur conduisant avec le pare-soleil baissé pour éviter les photos

Chauffeur conduisant avec le pare-soleil baissé pour éviter les photos

La course au chiffre

Si les sociétés qui gèrent les voitures radars privatisées ne sont pas rémunérées au nombre d'excès de vitesse enregistrés, Sébastien dénonce quand même une course au chiffre et à la rentabilité.

« Outre les kilométrages avancés des véhicules, la récurrence de certains parcours démontre vite que le but est le bénéfice financier, pas la sécurité ».

Il explique ainsi qu'il est possible de faire jusqu'à dix allers-retours consécutifs, toujours aux heures de pointe, entre 6 h et 8 h le matin, 16 h et 18 h l'après-midi sur des axes très fréquentés non pas pour traquer « les fous du volant, mais Monsieur et Madame Tout le Monde ».

Il dénonce également certains chauffeurs qui « roulent moins vite que de raison pour obliger les automobiles à les doubler et à commettre un excès de vitesse » et cela malgré les consignes de la direction qui leur interdit formellement ce genre de pratique.

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